Le tourneur et le bois

Les tourneurs ont la réputation d’utiliser des bois de fortes sections et d’en faire beaucoup de copeaux. A leur décharge, on peut dire que la plupart du temps les matériaux qu’ils utilisent n’intéressent ni le menuisier ni l’ébéniste. Peut-on parler de recyclage ?

Le tournage

Tous les bois se tournent, avec bien sûr plus ou moins de difficultés et des résultats très variables. En tournage traditionnel, on n’utilise que des bois secs et c’est là que surgit la difficulté : comment faire sécher des bois de grosses sections sans que des fentes apparaissent ?

Pour les plateaux jusqu’à 80 mm d’épaisseur environ, avec le séchage traditionnel sur aiguilles, les fentes apparaîtront seulement aux deux extrémités, souvent limitées au niveau de la première aiguille. Pour les branches et les troncs, les fentes apparaîtront aux deux extrémités et, souvent, il suffit pour les éliminer de tronçonner les deux bouts. Pour ralentir ce phénomène, on peut enduire les extrémités de paraffine, de peinture grasse, ou de colle. Mais pour certaines essences, particulièrement fissiles, les fentes s’étendent sur toute la longueur et pénètrent jusqu’au cœur. C’est le cas en particulier du prunier et du cerisier.
La meilleure solution est de fendre chaque élément en quatre en passant par le cœur. Le séchage sera beaucoup plus homogène et de toute façon, pour un tournage précis, il est recommandé de travailler hors cœur.

Le buis pose un problème particulier. Souvent de faible section, il a tendance à fendre sur toute la longueur. Il est recommandé de le stocker debout, dans un endroit humide, pendant plusieurs années avant de le mettre dans une zone normalement ventilée. Certains ont proposé une technique qui consiste, l’arbre étant sur pied, de le scier à la base, sur un peu plus de la moitié de son diamètre et de l’infléchir de façon à faire bâiller la fente. Cette opération doit se pratiquer avant la montée de sève. Au solstice d’hiver, on achève la coupe. La sève aura en majorité été pompée durant l’été par le feuillage, et le bois asséchera plus facilement avec moins de fentes.

Depuis quelques années, on tourne beaucoup de bois vert, et ce, pour plusieurs raisons. D’abord, il est plus facile de se procurer du bois vert que du bois sec. Et quel plaisir de dérouler de très longs copeaux et de creuser sans trop de peine ! Cette pratique est valable à condition de tourner des pièces fines et d’épaisseur uniforme, sinon les parties fines séchant plus vite que les parties épaisses, les fentes seront inévitables. On peut également tourner des ébauches de 20 ou 30 mm d’épaisseur par exemple, les mettre dans une boîte en carton, entourées de leurs copeaux et attendre plusieurs mois avant de reprendre l’ébauche pour la terminer. Les résultats sont bons, mais rares sont ceux qui ont la patience d’attendre un aussi long délai.

Quelques tourneurs se sont spécialisés dans le tournage du bois vert. Et c’est au prix d’une technique rigoureuse et d’une longue pratique qu’ils obtiennent des résultats souvent spectaculaires.

L’oléothermie consiste à placer la pièce dans de l’huile bouillante pendant une dizaine de minutes. Il y a quelques années, on préconisait de plonger le bloc de bois à tourner dans un bain de polyéthylène glycol pendant plusieurs jours. Cette méthode semble actuellement abandonnée en raison de son coût et des modifications qu’elle apporte à sa structure.

Il est possible également d’utiliser le four à micro-ondes, selon l’épaisseur, plusieurs séquences de durée variable suffiront pour sécher entièrement le bois. Cette méthode peut entraîner des déformations importantes, surtout si le cœur est inclus dans la pièce, l’effet parfois recherché et qui peut donner des résultats aussi spectaculaires qu’aléatoires.

Comment évaluer le degré d’hygrométrie du bois ?

Le plus simple est d’utiliser un humidimètre, instrument basé sur la résistivité du bois. Un bois dit sec présente un taux d’hygrométrie de 12 à 18 %. Si on ne dispose pas de cet instrument, des pesées régulières permettent d’évaluer la perte d’eau.

Il est recommandé d’entreposer le bois dans l’endroit où il sera travaillé, pendant une période suffisamment longue pour qu’il puisse s’adapter à la température et l’hygrométrie ambiante.